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Journée d'hommage à Rolande Falcinelli dans le cadre des Journées Messiaen en Avignon

Dans le cadre des Journées Messiaen organisées chaque année en Avignon, qui se tiendront du 31 mai au 7 juin 2009, une journée d'hommage à Rolande Falcinelli (1920-2006) manifestera les liens d'admiration réciproque ayant uni les deux disciples préférés de Marcel Dupré, avec une note spéciale, dans la thématique du deuxième concert, rappelant leur commun intérêt pour les musiques extra-européennes. Rolande Falcinelli était membre du Comité d'honneur de l’association "Orgue Hommage à Messiaen".

Samedi 6 juin 2009, deux concerts-lectures en la Collégiale Saint-Agricol d’Avignon, présentés par SYLVIANE FALCINELLI

à 15h45 : CONCERT VIOLONCELLE et ORGUE

PHILIPPE CAUCHEFER, Violoncelle
SOPHIE-VÉRONIQUE CAUCHEFER-CHOPLIN, orgue

Johann Sebastian BACH (1685-1750)
SUITE N° 2 en ré mineur pour violoncelle op 1008
(Prélude, Allemande, Courante, Sarabande, Menuet I, Menuet II, Gigue)

Léon BOELLMANN (1862-1897)
SUITE GOTHIQUE
(Introduction, Menuet Gothique, Prière à Notre-Dame (avec violoncelle), Toccata)

Rolande FALCINELLI (1920-2006)
KÉNOSE pour violoncelle et orgue

César FRANCK (1822-1890)
FANTAISIE en La Majeur pour orgue seul

Denis BÉDARD (1950)
SUITE BAROQUE pour violoncelle et orgue
(Allemande, Courante, Sarabande, Gigue)

IMPROVISATION sur un thème donné

à 20h30 : CONCERT FLÛTE et ORGUE

Élise BATTAIS, flûte
Philippe BRANDEIS, orgue

Rolande FALCINELLI (1920-2006)
AZÂN pour flûte et orgue op. 61 (1977)

Jehan ALAIN (1911-1940)
LITANIES pour orgue (1937)

Philippe GAUBERT (1879-1941)
SICILIENNE pour flûte et orgue

Rolande FALCINELLI (1920-2006)
KRISHNA GOPALA pour flûte seule op. 66 (1985)

Johann Sebastian BACH (1685-1750)
SONATE pour flûte et basse continue en Mi mineur BWV 1034

IMPROVISATION en duo

Écouter

Rolande Falcinelli · Azân Azân pour flûte et orgue, Cor Jesu Sacratissimum, Salve Regina, Krishna-Gopala pour flûte, Cortège Funèbre, Initiation à l'orgue (extraits: Mouvement perpetuel, étude X - Ricercare, étude XI - Toccata, étude XII, 1e et 2e version), Triptyque: Litanies, Rondel et Fugue Élise Battais, flûte - Philippe Brandeis, orgue Cathédrale Saint-Louis des Invalides (Paris), 21-26 août 2007 Église de Cergy-Village (Val d'Oise), 20-23 août 2007 [Krishna-Gopala] HORTUS CD 059     Pour le commander écrire à editionshortus@wanadoo.fr

À noter que le Dimanche 7 juin, une journée spéciale sera consacrée au Chant grégorien, autre passion commune à Olivier Messiaen et à Rolande Falcinelli, avec une Conférence sur le Chant grégorien par le professeur Louis-Marie Vigne (en la Chapelle Saint-Louis, à 14h30) qui, en compagnie de Philippe Brandeis, avait participé à la Cérémonie d'obsèques de Rolande Falcinelli (à Saint-Eustache le 30 Juin 2006, avec aussi le concours de Jean Guillou et du violoniste américain Jason Meyer), donnant précisément à cette Messe l'élévation spirituelle du Chant grégorien. Un concert par le Choeur grégorien de Paris, sous la direction de Brice Tissier, suivra en la Métropole Notre-Dame des Doms à 18h.
« Il n’y a probablement qu’une seule musique vraiment religieuse, parce qu’elle est détachée de tout effet extérieur : c’est le plain-chant que l’on appelle aussi chant grégorien. » , disait Messiaen, une opinion à laquelle souscrivait (dans le cadre de la musique européenne) Rolande Falcinelli.

Concernant l'improvisation, on renverra le lecteur au témoignage de Sophie Véronique Cauchefer-Choplin sur l'enseignement de l'improvisation par Rolande Falcinelli, écrit juste après la mort de celle-ci et paru dans "L'Orgue francophone n°35" (FFAO, 2007).

Les oeuvres de Rolande Falcinelli (1920 – 2006) présentées au cours de cette journée, font ressortir deux préoccupations dominantes de la compositrice: d'une part les sources d'inspiration orientales, d'autre part la volonté de faire vivre l'orgue en musique de chambre à l'égal d'un piano ou de tout autre instrument concertant.

L'Orient fut présent dans l'histoire familiale depuis que la mère de Rolande Falcinelli vécut dans l'ancienne Indochine française et s'imprégna des arts et philosophies extrême-orientaux en visitant le Cambodge ou l'ashram de Sri Aurobindo à Pondichéry.

Une oeuvre pour flûte seule, Krishna-Gopâla (op. 66, 1981) évoque une légende de la mythologie hindouïste : le dieu Krishna, souvent représenté jouant de la flûte, charme des bergères - les gopîs - qui dansent autour de lui, et va les posséder l'une après l'autre, par la magie de son image se dédoublant à l'infini. Les mille tours et coquineries joués par le jeune dieu séducteur aux jeunes filles croisant son chemin sont d'ailleurs une source de contes populaires dans l'imaginaire indien, guère asexué contrairement à l'héritage judéo-chrétien qui a façonné les "morales" occidentales. Les variations tissées par la flûte dans cette pièce ont une exubérance qui rencontre bien le sujet, et recourent à la modalité indienne.

C'est pourtant la tradition iranienne qui retint le plus l'attention de Rolande Falcinelli : assez tôt liée à l'ethnomusicologue Nelly Caron et aux plus grands musiciens iraniens, tels Dariouche Safvate et Djamchid Chemirani, elle développa une connaissance approfondie des modes, rythmes, types de jeu intrumental et vocal pratiqués en Iran. Plusieurs de ses oeuvres pour orgue proposent le fruit de cette imprégnation culturelle, qui atteignit son sommet dans Azân pour flûte et orgue (op. 61, 1977), où le (la) flûtiste semble par moments jouer du ney (la flûte persane tenue en diagonale) et où l'organiste se fait zarbiste (le zarb, instrument de percussion à peau). Les sonorités traditionnelles des instruments sont outrepassées, au bénéfice de sensations auditives véhiculant les sortilèges orientaux. Des versets du Coran sont placés en exergue de chacune des cinq pièces de cette suite : ils évoquent les heures de prière rythmant la journée du fidèle musulman.

Orgue et flûte, venons-nous de rencontrer : il y a bien d'autres combinaisons dans le catalogue de Rolande Falcinelli, soucieuse de prolonger la devise de son maître Marcel Dupré, "rattacher l'orgue à la musique". Orgue et voix, orgue et piano, orgue et violon, orgue et alto, orgue et 2 altos, orgue et violoncelle, pour nous limiter aux simples duos ou trios. Kénose (op. 68, 1983), pour orgue et violoncelle, est d'ailleurs le dernier de ces duos. Oeuvre intense et tragique, à l'écriture sombre et tourmentée, elle s'inspire d'une réflexion théologique sur les souffrances du Christ en croix. Elle révèle par ce "transfert" musical le caractère pessimiste et introverti de la musicienne, personnalité très inadaptée à la vie en société et se réfugiant volontiers dans sa vie spirituelle.

On sera surpris de constater, en l'espace de sept années, une telle diversité d'inspiration, et c'est cette capacité à investir l'esprit propre à chaque oeuvre, qui signe une création authentique, animée de la plus grande sincérité et jamais sujette à des "trucs" ou procédés susceptibles de la "dater". Cela explique peut-être pourquoi, depuis la mort de Rolande Falcinelli, la considération pour son oeuvre ne cesse de croître, spécialement auprès des jeunes générations qu'elle touche manifestement, autant par l'intégrité qu'elle révèle que par son pouvoir expressif.

Sylviane Falcinelli