Sulle opere di Jean Guillou in programma al 20° Festival di Saint-Eustache

On Jean Guillou's works featured at 20th Saint-Eustache Festival

De quelques œuvres de Jean Guillou au programme du 20ème Festival de Saint-Eustache


Un évènement exceptionnel lors du concert d'ouverture, le 7 mai 2009: une nouvelle version de la célèbre Symphonie Initiatique qui, lors de la parution du disque chez Philips en 1971 avait fait sensation par l'audace sonore déferlant de trois orgues en re-recording (l'enregistrement est réédité par Universal, avec toutes les autres gravures des années 1960/70, dans l'un des deux coffret consacrés à Jean Guillou qui sortiront au moment du Festival). Il y a souvent, dans l'inspiration de Jean Guillou, comme une évocation de rituels des temps immémoriaux - d'où le qualificatif "Initiatique" - convoquant les énergies primitives qui propulsent une musique visionnaire. Ici, la modernité d'un langage éruptif transcende des formes volontairement strictes, empruntées aux siècles anciens (Canon, Invention, Variations, Ricercare), sources de "l'initiation" aux règles de l'écriture savante. Le titre joue donc d'un double sens du mot "initiatique". Nous entendrons une adaptation réécrite par Jean Guillou pour deux organistes sur une même console : il la jouera avec Yanka Hekimova, qui fut plusieurs fois sa partenaire à deux orgues ou à 4 mains/4pieds, notamment dans la transcription par Jean Guillou des Danses Symphoniques de Rachmaninov.

Le 2 juillet, Ulrich Herkenhoff, flûte de pan et Jean Guillou, orgue, créeront le Colloque n°9 de Jean Guillou, écrit en 2008 pour cet artiste allemand dont la virtuosité dans des transcriptions de Bach pour l'antique instrument avait émerveillé le compositeur. Genre "inventé" par Jean Guillou dès les années 50 et pratiqué par lui tout au long de sa carrière pour les plus diverses formations, le "Colloque" indique bien la démarche dramaturgique du compositeur, mettant en scène plusieurs personnages musicaux qui échangent, se confrontent, s'enlacent, se heurtent, pour insuffler vie à une rhétorique du discours musical.

Ce genre a été décliné par trois fois pour piano et orgue, Jean Guillou se souvenant ainsi qu'il est autant pianiste qu'organiste, ce qu'il démontrera une nouvelle fois lors du Festival 2009. On entendra le 9 juillet, avec Zuzana Ferjencikova (orgue), les Colloques n°2 et 5 (écrits au long des années 60), témoignant de la diversité des débats autorisés par les deux instruments à clavier(s). Le n°2 (réédité lui aussi dans le coffret Universal cité plus haut, avec Christian Ivaldi au piano, et Jean Guillou à l'orgue) fait appel à un pianisme de haut vol, et les deux partenaires passent de la tendresse à la véhémence sans qu'aucun ne réussisse à triompher de l'autre, malgré une éloquence tout à tour irascible, enflammée, caressante.
Plus dépouillé, le n°5 prend en compte la problématique de la réponse des deux instruments dans une acoustique d'église (alors que les deux autres Colloques pour piano et orgue appellent plus volontiers la salle de concert) et privilégie des dialogues rythmiques d'un tout autre caractère, faisant appel à la diversité de toucher du pianiste, depuis les gouttes éparses sur le clavier jusqu'aux zébrures de segments plus incisifs.

La dernière partition de cet ensemble, le Colloque n°7, reçut même le sous-titre de Concerto pour piano et orgue, tant elle représente l'aboutissement – la sublimation, oserait-on écrire – des explorations de Jean Guillou relatives aux confrontations d'étoffe sonore entre les deux instruments; on y trouverait aussi des échos de ses préoccupations timbriques menées par ailleurs entre instrument soliste et orchestre. L'étourdissante modernité d'un pianisme déchaîné rencontre une écriture non conventionnelle de l'orgue pour ouvrir des espaces insoupçonnés à cette formation. Concerto à plein titre, également par l'ampleur de la forme et par la viruosité requise des instrumentistes, il recevra le 19 mai sa première française par Katherine (piano) et Vérouchka (orgue) Nikitine.

Le mariage trompette et orgue ne met en relief, trop souvent, que le brillant de formules tonalement éclatantes. Jean Guillou ne pouvait pas aborder ce "couple" de manière conventionnelle : il a donc écrit, pour Thierry Caens et lui-même, un véritable concerto de vaste envergure (au programme du 11 juin), où l'orgue apporte son "orchestration" à l'expressivité que déploie la trompette. L'ébauche d'un souffle, dit le titre poétique : les deux instruments sont mus par le vent, la trompette l'étant directement par le souffle humain; c'est donc l'infinie modulation de l'élément vital qui se donne à entendre. Le trompettiste, avec une maîtrise subtile du phrasé, doit se faire chanteur, et l'orgue le sertit avec sensualité.

Six duos d'un même compositeur, à l'affiche de ce festival, six conjonctions d'identités sonores pensées, rêvées en tant qu'organismes vivants au service d'une poétique en constant renouvellement.

Sylviane Falcinelli








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